Cinq cent mille Bouddhas et moi, et moi, et moi...
Après avoir admiré des milliers de stupas, nous allons contempler des centaines de milliers de Bouddhas. Non, non, je n'éxagère pas puisque rien qu'à la pagode Thanboddhay, dans les environs de Monywa, on peut compter plus de 500 000 statues de Bouddhas (512 028 selon le guide " Voir ", 582 363 selon le " GDR " et c'est le "Lonely Planet " qui l'emporte avec pas moins de 5 823 631 !! Vous l'aurez compris, pour préparer un tel voyage, mieux vaut avoir plusieurs guides papier pour corriger les âneries de certains !). En regardant de près, vous constaterez que les frises des murs intérieurs et extérieurs sont couvertes de petites statues de Bouddhas, ce qui explique leur nombre aussi élevé.
Les représentations de Bouddhas ont commencé avec le développement de la sculpture. Elles ont en commun trente-deux marques physiques qui symbolisent les existences antérieures du Bouddha actuellement vénéré. La protubérance crânienne, qui représente un bouton de fleur de lotus, est l'image de la présence spirituelle du saint homme.
Plus de cinquante gestes symboliques sont associés aux principaux épisodes de sa vie. Le plus connu est le geste de prise à témoin de la terre, qui atteste que Bouddha a atteint le Nirvâna.
La photo suivante montre le geste d'enseignement. Au passage, on peut ajouter à notre décompte un millier de Bouddhas, à l'ombre de leur banian respectif, dans ce parc au pied de la colline de Sagaing.
Les trois principales postures attribuées à Bouddha sont :
- la position du Lotus, qui est celle de la méditation. Ici nous sommes en présence d'une statue de 45 mètres (la hauteur d'un immeuble de 16 étages !), qui montre l'engouement du bouddhisme en Birmanie.
- la position debout, avec les mains décollées du corps, représente la bienveillance. Puisque nous sommes dans la démesure, l'image de Bouddha debout mesure 115 mètres de haut ; celle le représentant couché mesure 100 mètres de long.
- la position couchée est celle de l'attente de sa mort, qui le fera passer dans le parinirvâna (fin de l'existence d'une personne ayant atteint le nirvâna). Nous sommes ici dans les grottes de Po Win Daung, au nombre de huit cents, qui contiennent toutes plusieurs statues de Bouddha. Nous en rajoutons donc quelques milliers de plus !
Puisqu'il est couché, nous allons en profiter pour voir ce qu'il cache sous ses pieds. Ils sont ornés des cent huit préceptes qui représentent les trois mondes (cinquante neuf pour le monde inanimé, vingt et un pour le monde animé et vingt huit pour le monde conditionné). Nous vous le confirmons, Bouddha ne sent pas des pieds à part une légère odeur d'encens !
Le Bouddha ci-dessous ne mesure "que" 70 mètres de long. Mais nous lui pardonnons sa "petite taille" puisqu'il se trouve à l'intérieur d'une pagode (Chauzkhtakyi pagoda à Yangon). Il date de 1907 et possède une robe recouverte de feuilles d'or.
Au fait, nous ne vous avons pas raconté l'histoire de Bouddha : le Bouddha historique a vécu au cinquième siècle avant Jésus Christ. Il est né dans un village sur les pentes de l'Himalaya, dans le nord de l'Inde. Il a pour nom Siddhartha Gautama. Après avoir vécu sa jeunesse dans le luxe et l'aisance, car il faisait partie d'une caste de haut niveau, il quitte sa femme et son fils à vingt neuf ans pour entrer en religion. Il pratique la méditation pendant six ans dans l'austérité la plus complète. La voie qu'il choisit pour cette méditation lui fait atteindre le Nirvâna. A partir de ce moment là, il est appelé Bouddha, ce qui veut dire "l'éveillé". Il passe ensuite les quarante-cinq années de sa vie à enseigner les moyens d'atteindre cet éveil. C'est ainsi qu'est né le bouddhisme, qui regroupe les concepts de "Samsara" (réincarnation), "Karma" (loi de cause à effet) et Moshka (délivrance). Cette religion a pour but ultime le "Nirvâna", qui est l'aboutissement du cycle des réincarnations puisqu'à l'issue de sa dernière vie, l'individu se fond dans l'âme universelle.
Sur la photo ci-dessous, le symbole présent sur le front de Bouddha représente d'ailleurs le chemin à parcourir avant d'atteindre le Nirvâna. Il se nomme "unalome". Pour le décrypter, il faut partir du centre de la spirale où l'esprit n'est pas éveillé, suivre les circonvolutions qui représentent les épreuves de la vie avant de parcourir la dernière ligne droite qui mène à l'éveil.
Au fil de notre voyage, nous avons admiré beaucoup d'anciennes statues ou images de Bouddha qui ont conservé au fil des siècles la sérénité et la douceur des courbes qui caractérisent les Bouddhas birmans.
Ci-dessous, Bouddha en position debout, effectue le geste de protection en levant sa main droite, les doigts tournés vers le ciel.
La légende dit que la mère de Bouddha l'a conçu dans un rêve avec un éléphant blanc à six défenses, qui tenait dans sa trompe une fleur de lotus.
Elle accouche sur une branche d'arbre, sous une pluie de pétales de fleurs envoyée par les divinités. Bouddha sort de son sein droit. Dès sa naissance, l'enfant prend possession de l'univers en se tournant vers les quatre points cardinaux, puis il fait sept pas vers le nord. A chacun de ses pas pousse une fleur de lotus (vous vous en rappelez ?). Conformément à sa caste , son père lui enseigne l'art de la guerre. Lorsqu'il quitte la maison familiale, il rencontre la vieillesse, la maladie et la mort qui lui apprennent la souffrance. Sa quatrième rencontre avec un ermite vêtu seulement d'une robe jaune lui enseigne la voie de la sagesse.
D'après les textes anciens, il devint le septième Bouddha de tous les temps. Nous sommes actuellement en attente d'un huitième Bouddha, qui s'appelera Maitreya et qui apparaîtra à Benares, en Inde, dans la caste des Brahmanes (prêtres, professeurs, hommes de loi).
Il semblerait que sa naissance ait un peu de retard puisqu'elle devait avoir lieu mille cinq cents ans après celle du Bouddha précédent (né au cinquième siècle avant Jésus Christ). Ces mille ans de retard sont expliqués par son choix de la plus lente des trois voies pour accéder à l'eveil. D'aucuns disent que le nouveau Bouddha est déjà dans notre monde incognito ! Une chose est sûre, il existe un projet de construction d'une statue de cent cinquante deux mètres du nouveau Bouddha.
En attendant, la dévotion au Bouddha historique bat son plein. Nous vous dévoilons un petit secret : en cas de douleur à un endroit de votre corps, il suffit de coller quelques feuilles d'or sur la partie correspondante d'une statue de Bouddha pour faire disparaître le mal.
Les artisans de Mandalay ne se plaignent pas de cette adoration puisqu'ils fabriquent au quotidien des statues en marbre, en albâtre et en bronze.
Une activité assez poussiéreuse n'est ce pas ?
Nous allons maintenant voir les différentes étapes de la fabrication de bronzes à la cire perdue.
Lors de la 1ère étape, on confectionne un moule fait d'argile, de crottin de cheval, d'enveloppe de riz.
C'est une technique de précision, donc le moule doit être parfait dans les moindres détails.
Après séchage, le moule est recouvert d'une couche de cire d'abeille. Des conduits sont installés pour assurer à la fois l'évacuation de l'air et de la cire lorsqu'elle sera chauffée et le remplissage de l'espace libéré avec du bronze. Quelques clous sont enfoncés dans le moule ; ils serviront à maintenir le noyau interne en place lors de la sortie de la cire afin de garantir une épaisseur de bronze constante tout autour de la statue.
Sur la photo ci-dessous, le jeune homme applique sur la cire un deuxième moule d'argile appelé "moule de potée" qui servira à la cuisson de la pièce.
L'intérieur du moule est également rempli d'argile. Vous pouvez voir sur la photo suivante les conduits qui servent à évacuer la cire lors du passage au four (d'ou le nom de la technique "à la cire perdue"). Le moule reste ensuite en chauffe quelques heures afin d'éviter un choc thermique lorsque le bronze liquide sera coulé pour remplacer la cire. En effet, la température de fusion du bronze est supérieure à 1000°C.
Après refroidissement, la gangue d'argile sera cassée.
Les grandes statues sont faites en plusieurs morceaux. Il reste donc un travail de dégrossissage et d'assemblage du puzzle par soudure.
Les finitions sont ensuite apportées.
Et voilà notre Bouddha terminé !
Nous allons maintenant à Yangon, sous un des escaliers couverts qui mènent à la pagode Shwedagon, pour voir de la sculpture sur bois.
La pagode Shwedagon est le sanctuaire bouddhique le plus sacré de Birmanie et celui qui attire la plus grande affluence.
Son accés est protégé par deux chinthes qui sont des chimères de lion et de griffon.
Son stupa central, d'une hauteur de quatre-vingt-dix-huit mètres, est recouvert de 700 kilos d'or. Il contiendrait les reliques de quatre Bouddhas, dont huit cheveux de Siddhartha Gautama collectés alors qu'il était vivant.
Nous restons à Shwedagon pour assister à la récitation des Mantras, formules sacrées composées de phonèmes issues du Sanskrit. Leur signification n'est pas importante ; ce sont les effets vibratoires créés par chaque syllabe prononcée de façon répétée qui apportent de la puissance. Réciter des Mantras sert à faire le vide pour faciliter la méditation. De plus, cela permet d'atteindre la fréquence de vibration de l'univers. Des études scientifiques ont démontré l'effet positif de certains sons sur le corps humain. Ceux-ci stimulent les protections naturelles contre le cancer entre autres. Les Mantras intègrent ces sons bénéfiques avec leur résonance positive. Pour la petite histoire, lors de la consécration de la pagode Shwedagon, il a été récité des Mantras pendant ...six mois de suite non stop !!!
Sur la vidéo ci-dessous vous pourrez choisir le Bouddha à ramener en souvenir de votre voyage en Birmanie.
Quant à nous, c'est ce tout petit Bouddha qui a pris place dans notre valise. Il est en jade et nous permet de faire la transition avec le prochain reportage où nous vous emmènerons à Mandalay, dans le plus grand marché de jade de la planète.