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Le blog de Cath
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1 octobre 2008

Octobre rose

Le texte que ma Maman vous propose aujourd’hui est un peu "particulier", tout d’abord parce qu’il est très personnel (j’ai bien insisté auprès de ma Maman pour être certaine qu’elle ait envie qu’il soit diffusé), ensuite parce qu’il est aussi très douloureux (difficile de ne pas être ému à sa lecture…). Nous avons choisi cette période pour le diffuser car dans le cadre d’« Octobre rose », mois dédié à la lutte contre le cancer du sein, plusieurs manifestations ont lieu un peu partout en France. En Isère, c’est Rose, un personnage emblématique de 9m de haut, qui ira à la rencontre des femmes pour les informer et les inciter au dépistage précoce.

Avant de vous livrer son texte, ma Maman a tenu a ajouté quelques mots… 

Dix ans.....

Le récit qui suit est très personnel et relate une expérience pénible dont personne n'est à l'abri . J'ai longtemps hésité avant de le confier à Cath.  Il peut réveiller de douloureux souvenirs chez certains d'entre vous et j'en suis peinée. Je ne voudrais pas non plus qu'il fasse "pleurer dans les chaumières", ce n'est pas le but recherché. Ce texte est au contraire rempli d'espoir et il est surtout un hymne à la vie. Il faut le voir comme un témoignage utile pour dire à tous que la vie n'a pas de prix et qu'on se doit de tout faire pour la protéger.....

8h du matin un jour de Juillet 1998.

A demi-dévêtue dans la salle d’examen de l’un des chirurgiens les plus éminents de la spécialité sur la place de G…, j’attends le diagnostic, l’angoisse chevillée au cœur.

« Madame, je ne peux pas me prononcer. La grosseur est beaucoup trop petite pour que je tente une biopsie. Je ne parviendrai qu’à vous faire mal en n’ayant que très peu de chance de récupérer quelques cellules à analyser. Je n’envisage qu’une seule solution : opérer pour ôter la grosseur et effectuer, en cours d’opération, une analyse succincte, mais suffisante dans un premier temps, pour déterminer les modalités de l’intervention…. »

Son regard clair et direct, son sourire chaleureux ne parviennent pas à éloigner les images de mutilation qui défilent devant mes yeux. Sans doute y lit-il mes peurs et ma détresse. Il pose une main sur mon épaule et me dit :

« Je fais partie d’un groupe de chirurgiens qui travaillons avec de nouvelles techniques opératoires qui nous permettent de réaliser nos interventions en préservant au maximum l’aspect esthétique. Je puis vous assurer que le passage de mon bistouri sera pratiquement invisible ».

Rassurée ? Si peu… Les interrogations se bousculent dans ma tête. Et si c’était… Non, ce n’est pas possible…je ne veux pas... je ne pourrai pas le vivre… Mon Dieu, si par hasard vous existez quand-même, faites… Et s’enchaînent quelques semaines de jours gris et de nuits sans sommeil.

Début Septembre 1998.

Je suis dans la salle de réveil de la clinique B… Je palpe un énorme pansement au travers duquel je ne sens rien. Je vois des drains, des tuyaux… Ma tête est complètement vide ; je suis éprouvée par les nausées qui accompagnent toujours mes réveils après une anesthésie un peu longue. L’anesthésiste s’affaire pour tenter de mettre un terme à mon inconfort. Enfin, difficilement, il y parvient. On me reconduit dans ma chambre. Je ne suis pas encore totalement consciente : j’oscille entre sommeil irrésistible et éclairs de lucidité… La porte s’ouvre ; le chirurgien entre ; il est toujours en blouse blanche, l’air pressé : « C’est un cancer..Il est tout petit mais déjà agressif. J’ai épargné votre sein mais j’ai dû ôter la plus grande partie de la chaîne ganglionnaire. Bonsoir. Je repasserai vous voir demain matin ».

La porte se referme. Je suis seule. Un vide s’est créé à l’intérieur de moi comme si une pompe invisible avait aspiré tous mes organes. L’angoisse, puis la panique me submergent. Ma vie s’effondre : plus rien ne sera jamais comme avant. Je vais devoir vivre,  ou plutôt survivre…avec des traitements sans fin… et combien de temps me reste-t-il pour profiter de ce que j’aime ? Pourrai-je seulement encore profiter de quoi que ce soit ? Un sentiment de solitude immense s’empare de moi…. Comment imposer mon angoisse à mes enfants, à mes amis ? Il faut serrer les dents, ne rien montrer, ravaler les larmes… faire la courageuse quand on l’est si peu au fond de soi. Qui peut comprendre ce qu’on ressent dans ces cas-là ? Qui peut aider ? Une infirmière m’a aidée. Un soir, elle a pris le temps de venir s’asseoir au bord de mon lit. Elle a eu des gestes tendres et consolateurs. Elle a su me dire qu’il fallait que j’évacue cet immense chagrin, qu’il fallait que je pleure autant que j’en avais envie pour avoir ensuite la force de lutter. C’est auprès d’elle, une inconnue, que j’ai pleuré… et que je me suis dit que j’allais tout accepter, tout faire pour essayer de gagner cette bataille.

Un an plus tard.

Après l’opération, j’ai affronté la radiothérapie, puis surtout la chimiothérapie… Une épreuve extrêmement dure qui m’a anéantie et que j’ai mis une année complète à surmonter… Les contrôles sont satisfaisants. Je n’ai plus de traitement lourd. Je n’ai jamais interrompu mes activités intellectuelles (même pendant la chimio) mais je peux maintenant reprendre mes activités sportives. L’angoisse ne m’a pas quittée mais je peux de nouveau sourire à la vie… Mon petit-fils Maël est né pour l’anniversaire de mon opération. Quel meilleur pansement à l’âme qu’un nouveau petit-fils ?

Aujourd’hui.

Le spectre s’est éloigné. Je ne peux pas dire que c’est un épisode oublié de ma vie… je mentirais. J’y pense chaque jour. Mais j’y pense différemment parce que je crois qu’en même temps qu’une épreuve très difficile, cela a été une expérience riche d’enseignement.

J’ai appris que la vie est immensément précieuse mais aussi immensément fragile. J’ai appris que quels que soient les tristes moments que j’avais pu vivre,  j’aime la vie, j’ai envie d’être heureuse et de rendre heureux ceux que j’aime. J’ai appris qu’il y a des choses importantes et d’autres qui ne le sont pas du tout. Les choses importantes ce sont l’amour ( au sens large ), la solidarité, l’écoute, l’aide qu’on peut apporter aux autres ne serait-ce qu’avec un sourire, la disponibilité, les plaisirs de toute sorte… J’ai appris à reconnaître mes vrais amis, ceux qui ne m’ont pas dit : « Tu sais, j’ai bien pensé à toi… Mais si je ne suis pas venu (si je n’ai pas téléphoné), c’est parce que je ne savais pas quoi te dire.. » Justement, j’ai appris que lorsqu’on aime on peut toujours dire quelque chose… et même ne rien dire parce qu’un geste tendre ou un regard affectueux c’est aussi réconfortant que des mots. J’ai tellement appris !

Et en cet anniversaire des dix ans, je dis «  Vive la vie ! ».

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Commentaires
N
La chronologie des faits du récit de ta maman est très poignante... Les passages où elle se rappelle des paroles des différents acteurs de son histoire sont très bien écrits car criants de véracité ( il y a des moments de nos vies que la mémoire n'efface pas ! Hélas ! )..Tous les passages du récit avec des phrases interrogatives sont magnifiques : ce type de phrases que l'on se pose en boucle quand vient l'heure où " ça n'arrive plus qu'aux autres" ! Et la conclusion où elle conte la réaction des autres est tellement belle et tellement vraie !!!! Moi mon père, très populaire, très sociable , très à l'écoute des autres, très " vive la joie" avait énormément souffert de cette mise à l'écart pendant son cancer : le téléphone qui ne sonne plus, les amis qui ne viennent plus, qui ne passent plus boire un verre, un café, les mines contrites quand on le croisait, les têtes affligées qui le confortaient dans l'idée que l'échéance fatale était bientôt arrivée pour lui , la famille (qu'il avait aidée) qui ne l'invitait plus ... par peur de voir ... par crainte de se dire : " Quelle tête faire devant Michel ? Si on est gai, ce sera déplacé ? Et puis si on pleure, ce sera pire... Allons occultons le tout sur le principe du " pour vivre heureux vivons cachés ". En fait cette "longue maladie " comme on l'appelle par euphémisme , au delà des terribles douleurs physiques, engendre une douleur tout aussi pénible et intense : la SOLITUDE , la souffrance d'être "oublié "... Oui les petites phrases "j'ai pensé à toi, tu sais mais ... mais je me disais que tu préférais peut-être rester tout seul ( les gens pensent pour vous et savent ce qui est bon moralement pour vous !!! )", " j'ai pensé à toi mais je me disais que tu préfèrerais te reposer ". Oui ces phrases-là tous les malades de ce terrible cancer les ont entendues. Ta maman les transcrit bien. <br /> <br /> <br /> <br /> Le texte de ta maman est très beau ... bien sûr il est émouvant... bien sûr il me remue . Si je peux me permettre: vous devriez l'envoyer à une association type " lutte contre le cancer" car il est magnifique et redonne espoir , foi et énergie....même à ceux qui, comme moi, oublient la beauté de la vie à cause d'insignifiantes broutilles. Il mérite d'être lu à plus grande échelle que ce blog même si je vois que ce post a déjà recueilli plus de cent commentaires...Moi , plus intimement, je vais l'imprimer pour le lire à ... ma Maman . Je suis sûre qu'elle sera très touchée et qu'elle pensera à son Michel parti trop tôt, qui aimait la vie, qui aimait les plaisirs de la table, qui aimait les gens et ... s'est senti si seul aux heures dramatiques de sa vie quand il aurait eu besoin d'être entouré de soi-disants amis, d'une pseudo famille qui pour reprendre l'expression si juste de ta mère " ne savait pas quoi dire ! ". Pardon d'avoir été longue dans mon com'. Je vous embrasse très très fort, ta Maman et toi. Je pense très fort à vous . Et je ne le dis pas pour faire joli sur ce " com" de blog. Tu le sais, Cath ! . Courage, Maman de Cath ! . Courage, battez-vous ! Oui, battez-vous ! On compte sur vous pour le faire.
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V
Voilà, pour moi ce fut juillet 2010, et OUI vive la Vie !!!<br /> Bravo pour témoignage<br /> Bises<br /> Valérie
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C
Quelle leçon de courage la vie est belle elle vaux la peine de s accrocher de lutter entourer d amour et d amitie <br /> ce message de 2008 lu en 2010 est toujours aussi emouvant <br /> gardons l espoir que la medecine feras ENCORE des progres
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S
De l'émotion, des frissons, des souvenirs lointains et pourtant tellement de présence, j'ai perdu ma maman il y aura 4 ans le 3 octobre prochain, pour elle encore, pour ma fille, pour moi, pour toutes les femmes qui m'entourent je serais sensible à jamais à cette cause...Petite page de scrap et marche à paris le 4 octbre 2009... Merci à vous, à votre maman pour ce moment d'échange et de partage. Amicalement.<br /> Sabinedetremblay
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H
Bonjour Cath, Bonjour Maman de Cath<br /> <br /> Je ne peux pas ne pas laisser un petit mot car même si par chance et pour l'instant, dans ma famille, nous sommes épargnés par cette maladie (mais pas par d'autres hélas !!!) j'ai trouvé important la conclusion ... C'est vrai que moi la grosse bavarde, parfois je ne sais pas quoi dire .. je me trouve toute bête .. Cet été j'ai passé une grosse épreuve, ma voisine du 5ème (je suis au 6)après avoir perdu son mari il y a 3 ans a perdu son fils de 34 ans dans un accident de moto !!! Quand je suis rentrée de vacances, la nouvelle est tombée !!! J'appréhendais le moment .. Que dire mon Dieu ???? et pourtant j'étais triste, triste pour elle .. je voulais lui dire que mème si moi cela ne m'arrivait pas, j'étais triste pour elle, j'avais mal pour elle .. et puis le grand moment est arrivé et je n'ai rien trouvé à lui dire qu'une grosse embrassade !!!!! Pendant quelques minutes je l'ai bercé !!!! Trés franchement, je ne trouvais pas mes mots et j'ai cru que ma réaction n'était pas à la hauteur ... Là, Maman de Cath, tu m'as mis du baume sur le coeur !!!<br /> <br /> C'est comme la première fois qu'elle est venue me chercher pour aller marcher une heure ... Nous allions en groupe de 4 amies et un jour de septembre nous n'étions que nous deux et c'est elle qui est venue à ma porte !!! Les boules !!! De quoi allions nous bien parler ??? Finalement j'ai opté pour l'humour et la faire rire en lui racontant les histoires de bureau !!!! mais je n'ai jamais trouvé les bons mots, moi, la grosse bavarde<br /> <br /> Bisous<br /> Marie-Hélène à Madrid
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